Après une grande lutte qui a duré plus de trois ans, le parlement européen a adopté, pour Internet, une directive sur le droit d’auteur. L’objectif principal de la directive est de protéger le droit d’auteur. Pourtant, deux des articles de la directive sont décriés et semblent avoir des portées plus liberticides que salvatrices.

En effet, depuis Janvier 2015, l’eurodéputée Julia Reda mène une bataille acharnée contre les articles 11 et 13 de la directive. Selon elle, les divers articles précisés risqueraient d’entrainer une limitation de la liberté d’expression et une sorte de dépendance entre la presse et les géants du Net.

Selon les partisans de la directive, représentés par la majorité des eurodéputés et surtout les industriels de la culture et les grands éditeurs européens, cette loi, ainsi que ces articles 11 et 13 sont nécessaires pour la sécurisation des échanges et des publications sur Internet.

Des articles très discutés

Le premier article de la directive objet la grande lutte est l’article 11. Cet article instaure la création d’un « droit voisin » par lequel les hébergeurs de contenus, les sites Internet doivent verser des droits aux auteurs des textes cités, qu’il s’agisse de lien promotionnel ou de simple extrait. En théorie, l’article protège de la manière la plus répressive les auteurs des textes, mais son application peut entrainer des dérives.

Selon l’European Innovative Media Publishers, association des éditeurs de presse indépendants, cette disposition est dangereuse en ce qu’elle a déjà été appliquée en Espagne, ce qui entraina la fermeture en 2014 par Google de son service Google News, hébergeur d’actualité, dans ce pays.

Pour les autres détracteurs de l’article, la mesure pourra entrainer une sorte de « link tax » qui, d’une part, pénalisera les échanges d’informations et d’autre part, pour La Quadrature du Net, association de défense des libertés numériques, augmentera les problèmes de dépendances de la presse par rapport au géant du Web Google Apple Facebook Amazon et Microsoft (GAFAM).

Le second article de la directive qui semble ne pas faire l’unanimité est l’article 13. Dans ce cas, les hébergeurs ont le droit de pratiquer un filtrage automatique des contenus, sans qu’il soit nécessaire d’attendre que ce contenu soit signalé. Ce type de filtrage est, en effet, déjà pratiqué par YouTube depuis plusieurs années.

Même si cette mesure entraine une évidente protection contre les publications illégales et celles portant atteinte à l’intégrité de certaines personnes, elle risque d’introduire une grande limitation de la liberté d’expression face aux hébergeurs désormais fondés à gérer les publications comme ils l’attendent.

Selon l’hacktiviste Cory Doctorow, plusieurs plaintes et réclamations frauduleuses et excessives seront prises en compte par les hébergeurs. Le 11 Septembre, l’hacktiviste a d’ailleurs présenté plusieurs exemples de dérives qui ont déjà été remarquées aux USA depuis 2012. Ces plaintes ont majoritairement eu pour objectif le retrait d’informations gênantes. Ce phénomène, le « Copyright Madness » deviendra alors selon lui un évènement constant.

Une bataille déjà perdue

Malgré ces articles manifestement répréhensibles, la directive fut adoptée en ses dispositions les plus répressives. Suite à la croisade menée par Julia Reda contre ces lois liberticides, les deux articles avaient pourtant été retirés puis réintroduits successivement. Malheureusement, cette réintroduction fut définitive et l’adoption semble désormais ne plus pouvoir souffrir d’aucune contestation.

Il est vrai que la tentative engagée par le rapporteur du texte, Axel Voss pour une application accélérée avec une négociation directe avec la commission et le Conseil de l’Europe a été un échec. Pourtant, la directive ne pourra raisonnablement plus être annulée. La procédure expresse n’ayant pas abouti, le texte sera soumis aux négociations entre les représentants du Conseil des ministres des États européens, les représentants du Parlement et ceux de la commission.

Chacune des parties composant ce trilogue a cependant déjà admis soutenir la directive. Le seul rempart reste encore le conseil des ministres, qui en France a déjà apporté son accord. Pour mémoire, le président français indiquait déjà avant le vote qu’il s’agissait d’un « combat fondamental pour le droit d’auteur ».

Dès lors, les discussions restantes ne seront qu’une formalité et l’application de ces directives controversées, qui seront une fois de plus soumises au vote du Parlement en Janvier 2019, se fera sans grandes complications.

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