La candidature de l’Arabie Saoudite à l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) provoque gêne et embarras chez les états-membres, soucieux de ne pas froisser la monarchie pétrolière, mais pas vraiment emballés à l’idée d’accueillir en leur sein un pays connu et reconnu pour ses violations répétées aux droits de l’Homme et aux principes démocratiques.
Avant même l’assassinat (confirmé par Ankara) d’un journaliste d’opposition saoudien dans les locaux du Consulat du pays à Istanbul, la demande de l’Arabie Saoudite de rejoindre l’OIF avec le statut d’observateur faisait grincer des dents. Outre les liens, qu’on pourrait qualifier pudiquement de ténus entre l’Arabie Saoudite et la francophonie, le trouble est plus profond pour la plupart des états-membres de l’OIF.
Comme l’épisode stambouliote est venu le rappeler, Riyad est loin de partager les valeurs de démocratie, de défense de la liberté d’expression, de respect des droits humains qui sont au cœur des institutions de la Francophonie. Accepter l’Arabie Saoudite dans l’OIF serait perçu comme un lourd reniement des principes fondateurs de la francophonie dans de nombreux pays.
Car la francophonie n’a pas vocation à n’être qu’un club des pays où une part significative de la population parle français. C’est une communauté de principes et de valeurs universalistes qui, depuis vingt ans, a permis d’enregistrer nombre de victoires et d’avancées en matière de droits de l’Homme. Quel message enverrait l’OIF à tous ses bons élèves, si l’Arabie Saoudite, qui ne fait même pas semblant d’essayer, intégrait ses rangs.
D’où le dilemme qui traverse depuis de longs mois les rangs de l’OIF entre les pragmatiques qui estiment que de par son poids économique, diplomatique et géostratégique, l’Arabie Saoudite doit être acceptée comme membre observateur, et les autres, plus nombreux, qui pensent que la fortune saoudienne ne peut pas être un laisser-passer aux graves manquements aux droits de l’Homme et à la démocratie constatées chaque jour dans le royaume.
L’Arabie Saoudite n’en est pas à sa première tentative de rejoindre l’OIF. En 2016 déjà, le pays avait présenté sa candidature… et créé les mêmes remous au sein de l’institution qui, poliment, avait fini par déclarer le dossier saoudien « incomplet ». On peut s’attendre au même résultat à l’occasion du prochain sommet de l’organisation à Erevan les 11 et 12 octobre.